Je suis debout sur l’autel du temple Aberdeen
En ce jour de hangover national En plein milieu des rites annuels d’Acadie Rock C’est à mon tour de faire des invocations Et d’être prêtresse pour le peuple J’voulais vous écrire un poème Avec des incantations magiques Et des métaphores mystiques J’voulais vous ensorceler avec un charme Qui vous mettrait sous le mien J’voulais vous manipuler avec mes mots Vous hypnotiser avec mon humour Je voulais me mériter une initiation À l’ordre des poètes du patrimoine Mais Ce soir, j’ai une promesse à préserver Des obligations à obéir J’ai fait mon serment d’allégeance À la diaspora Acadienne elle-même Alors, au nom des Badlands et du peuple perdu J’ai le devoir solennel De vous livrer le message suivant: Chers membres du public: vous êtes un paquet de privilégiés On m’a dit que je ne devrais pas vous accuser Que jamais vous ne me pardonnerez Que dans un petit milieu faut pas être trop dangereuse Que faut pas tuer sa carrière à coup de mitrailleuse Mais Fuck it La vérité c’est un processus violent Et j’me kamikazerai pour la cause n’importe quand Sous nos pieds Dorment des maisons d’éditions Des compagnies de productions Des galeries d’art, des écoles de danse Où ce festival-même se manigance Il y a plus de choses prises pour acquis En ce moment sous ce plancher Que j’ai vu dans toute ma vie dans l’Acadie des oubliés Vous entendez ce soir sept poètes Well, 6 poètes Et une créatrice de chaos Qui créent dans votre langue Celle dans laquelle vous vivez Sans trop y penser Tous les moments importants d’une vie: Boire, rire, pleurer. Danser, débattre, hurler Aimer, haïr, fourrer Sans en avoir honte Sans même vous en rendre compte Elsewhere, at the exact same time Les Badlands sont toujours en crise Pris en état de banqueroute culturelle La dette linguistique nationale augmente La sécheresse perdure Nos idées ne poussent pas On souffre de malnutrition identitaire Dans le royaume des affamés On n’arrive pas à récolter nos communautés Ici, c’est l’obésité omniprésente On se plaint, le ventre gonflé D’avoir encore trop consommé de culture On se gave jusqu’à l’écoeurantite L’embarras du choix est une vraie épidémie Le diagnostic des gâtés pourris C’est du “j’les ai dejà vus y’a pas longtemps” et du “c’était meilleur dans notre temps” C’est dire avec sincérité la devise des privilégiés: “y’a trop de choses ce soir, j’peux pas me décider” C’est la discordance de la boulimie blasée À côté de la famine flagrante Les miettes qui tombent de votre buffet Nous nourriraient pendant longtemps Si on va continuer à s’imaginer Tous assis autour de la même table Il va falloir un jour adresser Les déséquilibres indéniables Il y a un tier-monde Acadien Ce qu’on nomme naïvement “La patrie en voie de développement” Appelez-ça comme vous voulez Mais ayez au moins la sensibilité d’y penser Si j’ai le ton un peu sec Les idées en papier sablé C’est parce que je viens de survivre trois décennies dans le désert des Badlands Où les oeuvres de notre littérature Sont de mystérieuses légendes Celles qui sont exposées sur nos étagères Sont des artefacts précieux Des reliques rapportées dans nos bagages Souvenir de longs pèlerinages Let’s get real for a minute Vos écrits n’existent pas chez nous Les Acadiens des Badlands N’ont pas lu vos oeuvres Même moi, l’auto-proclamée Forte-parole et poster-exiled Du peuple qui peine à survivre Je n’ai pas vraiment lu vos livres Might as well admettre ici et maintenant, Que je suis la poète la plus inculte Que vous entendrez ce soir Que j’ai lu Georgette mais pas Raymond-Guy Que j’ai lu Pélagie mais pas le reste Que ça fait juste un an que j’ai connu Gérald Dans la reading room à Marc Chamberlain Que je n’ai jamais tenu une copie d’Acadie Rock dans mes mains J’mens sors mieux que la moyenne… D'analphabétisation à 66% Mais c’est dû en grande partie À la générosité de ce poète barbu Qui me laisse boire de son oasis Après que son vin le couche J’me self-medicate avec sa bibliothèque Je comble mes lacunes avant qu’on les pointe du doigt Je guéris mon ignorance une page à la fois Et si nos étagères nues sont tristes La vraie tragédie c’est les rayons vides De notre imaginaire Tu peux pas te chercher dans une culture Sans y être initié Tu peux pas détruire l’establishment Sans savoir où viser On aime gonfler nos poitrines En disant que notre pays est intérieur Et a pour limites territoriales Les parois de nos coeurs Mais les frontières relèvent du réel Même dans notre pays imaginaire C’est de leur faute que même ici avec vous J’ai toujours un statut de minoritaire Notre peuple est encore à la dérive Le temps fait croître la distance entre nous Comme l’expansion de l’univers Qui nourrit le vide entre les astres Des années-lumière nous séparent maintenant Et vous projetez votre mythologie Sur nos lueurs dans votre ciel Pour faire des constellations auto-référentielles Mais c’est juste sur votre planète Qu’il y a eu une Renaissance Acadienne Qu’il y a eu un 68 Qu’il y a eu un Kacho Que le chiac a été poétisé Que l’Acadie a été ré-inventée Si le temps est mesuré à partir de révolutions, Faut pas s’étonner qu’on a du mal à se synchroniser Alors que le cosmos entier est le canvas de vos créations Nous on reste figés dans une autre dimension J’ai une bonne nouvelle pour vous Ce poème accusatoire a bel et bien une fin Le rituel de la réprimande sera complet Et vous pourrez vous recacher Dans le confort de vos nombrils Mais cette libération est conditionnelle Quand j’aurai fini de jouer à la poète dissidente Interdiction formelle de me dire les choses suivantes: UN Ne me dites pas que Moncton est actually pas mal anglais Que ça s’assimile ici aussi Que votre bilinguisme est difficile Pour une une fois dans vos vies Ayez la compassion de vous taire Ne vous mettez pas encore une fois Au centre de l’univers DEUX Ne venez pas me faire la leçon Et me dire que cette opulence est le fruit de longs labeurs Je n’en ai jamais dit le contraire Et c’est pas parce qu’il y a des riches qui ont beaucoup travaillé Qu’on ne devrait pas parler de pauvreté TROIS Ne venez pas me dire que la Nouvelle-Écosse Est présentement très en vogue Si je suis fière de notre Baie Sainte-Marie Elle est loin de représenter mon vécu Pendant que vous êtes émerveillés par son phare Les Badlands restent toujours dans le noir Revenez me voir quand vous avez fait le constat De Pubnico, Pomquet et Petit-de-Grat QUATRE N’allez pas dire dans mon dos Que j’exagère et que je dramatise Si vous voulez me neutraliser En m’accusant d’hystérie Ceci est votre invitation faussement polie De retourner dans votre own millénaire Anyways j’me suis déclarée l’émissaire des enragés Et je refuse de descendre du haut de mes frustrations Je vois plus clair à partir d’ici Et la colère est l’encre avec laquelle j’écris FINALEMENT N’ayez pas la prétention de croire Que vous pouvez me battre à mon propre jeu N’essayez pas d’avoir le mot final En venant me dire, sûrs de vous (Sarcasm face) Que j’ai quand même fait le choix indépendant D’être dans l’endroit que je critique incessamment Parce que oui, j’ai opté pour l’exile Mais mettons quelque chose au clair: Chuis ici en tant que réfugiée linguistique Et je souffre de post-traumatisme culturel Je fais encore des cauchemars Où je revois ma Génocideville adorée Le désert des Badlands est en flammes L’assimilation égorge des familles entières Des cris silencieux me hantent Mes plaies sont encore saignantes So oui, j’ai crissé mon camp en claquant la porte Mais j’ai quand même le coeur cassé Conséquence de mon incapacité de construire une communauté Où je suis capable de communier et de créer Pour une fois dans ma vie j’ai voulu être une privilégiée Goûter à toutes les richesses que je vous ai enviées J’ai payé à plein prix mon exile En échange du rêve d’une Acadie plus facile L’Acadie où la patrie se vit sur les trottoirs Où un bataillon de poètes fait la patrouille de nuit Où tous les backyards sont des centres communautaires Où les agents de la contre-culture sont mes mentors Où les penseurs et les artistes s'entassent sur la même terrace Où on conspire toujours une révolution après quelques verres Où on menace constamment de tout recommencer à zéro Où tout n’est pas tâché de honte et de tristesse Où parler français n’est pas un acte révolutionnaire Où il y a la reading room à Marc Où on inaugure au lieu de commémorer Où la déportation est finie Où on tombe en amour en français Où on peut se saturer de culture Où on peut toucher au sacré dans le Temple Aberdeen Où je ne suis jamais la seule Acadienne Où j’peux vivre toutes mes émotions dans ma own langue Où je peux lire mes poèmes à haute voix Où mes mots sortent de leur coma Où j’peux appartenir à quelque chose qui me ressemble Où ça se passe tout autour de moi Où ça me rentre dans l’âme Où je suis venue me perdre Où j’essaye encore de me retrouver Well, C’t’affaire-citte peux clairement pas finir de même So j’vous propose un toast On lève nos verres à tous ceux qui ne sont pas ici avec nous À ceux qui ont raison d’être jaloux À ceux qui n’entendent jamais des poètes À ceux qui ont le 15 août comme seule fête À ceux qui ont mal à leur Acadie À ceux qui rêvent de vraiment vivre leur patrie À ceux qui ont trop honte pour parler À ceux qui ne savent même pas ce qu’ils sont en train de manquer À ceux qui n’ont jamais aimé en français À ceux qui se trouvent juste drôles en anglais À ceux qu’on oublie toujours À ceux qu’on ne mentionne jamais dans nos discours À ceux qu’on a un peu abandonné À ceux qui se sentent seuls et isolés À tous ceux qui ne sont pas des privilégiés comme nous
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Des fois, t'as des invitations que tu ne peux juste pas refuser. Quand les filles et moi on revenait du lancement de mon exposition, et les boys de la Tide school nous ont invité à hanger avec eux pendant qu'ils travaillaient sur la mixtape CUTE, on pouvait pas dire non. Après avoir réfléchi à ce label et avoir écrit sur le sujet, je devais évidemment voir ce qui se passe là-bas! En plus d'espionner, on a même fini sur une des tunes, RAM (32 GB). J'ai pris des photos en studio itou, parce chuis nosy. La lancement officiel de CUTE est le 19 mars à 20h au bar Le Coude de l'Université de Moncton. Manquez pas ça! Des fois, des révolutions commencent dans la rue, avec des manifestants, des pancartes, et de la rage. Des fois des révolutions commencent dans un garage psychédélique, avec des guitares, des chansons et des micros. Cette fin de semaine, j'ai été voir la deuxième sorte. Le Tide school (studio B) a été hôte d'un show avec Dan Gaudet + amis, Quiet Parade, Rain Over St Ambrose, et Arthur Comeau . Tous les artistes viennent du sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, ils ont tous des liens à l'Acadie, ça se vit ça se sent, mais personne a besoin de le dire constamment. Mélange de Par-en-haut et de Par-en-bas, comme ça devrait l'être. Voici la groovy soirée en images: Toutes photos Céleste Godin 2015
Musique recommandée pour la lecture de ce post: Meteghan par Arthur Comeau Aujourd'hui, la plage de Meteghan célèbre subtilement la fierté gai. La preuve? Il y a un arc-en-ciel caché. Il y a aussi la question des bêtes qui habitent à cette plage. Qu'est-ce qui habite dans ces trous? Aujourd'hui c'était des petits oiseaux qui entraient et sortaient de leurs maison dans le sable. Mais une fois, le soir, on a vécu une autre chose. J'étais avec des amis sur cette même plage. La lune était sortie, il faisait beau. C'était un peu le paradis. En arrivant sur la plage, avec nos lampes de poche, on a trouvé les trous dans la petite falaise de sable. Mes amis se sont approchés (moi j'avais trop peur). Ils ont regardé un des trous: "On dirait un oiseau" "Non, ça ressemble plus à une souris" "AHHHHHHHHHHH!" La chauve-souris est sortie de son trou à toute vitesse. On est partis en courant presque aussi vite. La chauve-souris volait au-dessus de l'eau, sous la lumière de la lune. C'était à la fois magique et terrifiant. Je n'ai pas osé voir dans les trous aujourd'hui pour voir s'il y avait des chauve-souris qui y dormaient... Mais j'ai trouvé plein d'autres bébelles sur la plage: |
À proposJe suis Céleste Godin Ici sont mes idées, des pensées pas rapport et du random junk. C'est kind of intéressant, hopefully. Note sur la langue utilisée:
Ce blog n'a pas honte d'utiliser des mots anglais ni d'inventer des mots. Afin d'alléger le texte, le genre féminin est utilisé. Le masculin est inclus lorsque le contexte l'indique. Le stuff que t'as manqué
January 2021
Les modes de stuff
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