Bienvenue aux badlands de l’Acadie, Dans les déserts de nos îles Des presqu’îles, du presque pays La diaspora oubliée Abandonnés ici il y a longtemps Peuples sculptés par l'érosion Des centaines d’années à être seuls Et pourtant on respire encore Ici, c’est l’Acadie des autres L’ Acadie des méconnus L’Acadie des mal-aimés L’Acadie des mal-compris Ici on a tous des accents étranges À force de seulement se parler entre nous On nous dit qu’on sonne comme des anglais Par des gens qui nous sonnent comme des québécois Ici, on ne les a pas lus vos livres Y’a pas place à les acheter On ne connait pas plus les artistes de la grande Acadie Qu’elle connaît les nôtres Ici on ne parle pas le chiac C’est pas cinquante-cinquante On ne conjuge plus nos verbes J’ai park ma bike, j’ai cross la street Ici on s’en fuck des services offerts Parce qu’il faudrait parler à des étrangers Et publiquement admettre Qu’on ne sait pas dire “plaque d’immatriculation” Ici chaque mot de français dit en public Est une révolution ouverte Et nous rend récipiendaires De confusion et de honte mal cachée Ici, on n’a pas eu de 68 Pas de sit-in à l’université Pas de révolution dans les rues On en aura probablement jamais Ici nos écoles nous ont coûté cher On a payé le prix jusqu’à dans nos familles Frère contre soeur, ami contre voisin En se battant contre notre propre ignorance Ici, dire quelque chose Dans une langue qui devrait être la notre C’est se faire brûler au bucher Sans jamais devenir un saint Ici, parler en français à ses amis C’est se prendre pour un autre C’est oser rentrer ses desseins politiques Dans la sphère du social Ici l’anglais, c’est pas l’ennemi, C’est notre famille et notre vie On ne sait plus comment vivre notre langue Sans cracher sur ceux qu’on aime Ici nos écoles sont pseudo-francophones On y vante nos notes en anglais Alors que nos corridors sont infectés De faiblesses et de déception Ici on se croit complètement seuls
Uniques au monde à vivre nos malheurs On a inventé l’assimilation On a inventé le désengagement Ici on est encore des déportés Jamais vraiment remis de l’événement Notre renaissance Acadienne N’arrivera peut-être jamais Ici, on a les voix rauques À force de crier qu’on est là nous aussi Que les badlands identitaires Pourraient faire partie du pays What the hell que je fais ici Toute seule dans un désert que j’ai choisi Où j’ai un mal chronique Dans le potentiel perdu Mais pourtant je reste Pour faire la martyre-patriote J’ai peur que si j’arrête d’en témoigner Mon royaume va cesser d’exister
8 Comments
Samuel Vézina
3/11/2015 03:02:09 pm
Vraiment touchant.
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France Le Brun
3/11/2015 04:56:14 pm
Merci, j'aime beaucoup...
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Sophie Le Breton
3/11/2015 05:48:05 pm
Acadienne et fière de l'être, ce poème m'a profondément touchée. Magnifiquement dit et écrit.
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Arseneau Maxime
3/11/2015 05:48:40 pm
Je suis Québécois, Acadiens des Îles-de-la-Madeleine. Pis, j'ai tout compris...
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Jeannine Gautreau
3/11/2015 07:01:14 pm
J'aime beaucoup.....je l'ai relu 2 fois tellement c'est bien et beau.
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Hughie Batherson
3/11/2015 07:14:46 pm
Des propos inspirés de l'âme. T'as vraiment le don pour créer de la poésie authentique acadienne!
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Suzanne Laplante Edward
3/11/2015 07:36:44 pm
j'ai tellement d'admiration pour les Acadiens, avec lesquels je vis tous les étés au Cap Brûlé!
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Nancy Juneau
4/11/2015 08:23:11 am
Bravo Céleste, éloquent, touchant. Je suis contente que tu restes...
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À proposJe suis Céleste Godin Ici sont mes idées, des pensées pas rapport et du random junk. C'est kind of intéressant, hopefully. Note sur la langue utilisée:
Ce blog n'a pas honte d'utiliser des mots anglais ni d'inventer des mots. Afin d'alléger le texte, le genre féminin est utilisé. Le masculin est inclus lorsque le contexte l'indique. Le stuff que t'as manqué
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